Publié le 15 mars 2024

Face à un défi technique, l’instinct pousse souvent à chercher la solution la plus évidente ou la moins chère. Pourtant, la véritable performance en ingénierie de construction ne réside pas dans l’application de recettes toutes faites, mais dans l’art de la variante. Cet article démontre que la plus grande source d’innovation est la contrainte elle-même, qu’elle soit budgétaire, climatique ou réglementaire. Il s’agit d’adopter une philosophie où chaque obstacle devient un catalyseur pour concevoir des solutions plus ingénieuses, durables et économiquement supérieures sur le long terme.

En ingénierie de construction, la pression est constante. Respecter les budgets, tenir les délais, intégrer des normes de plus en plus strictes… Face à cette complexité, la tentation est grande de s’en tenir aux méthodes éprouvées, à la solution technique qui a « toujours fonctionné ». On parle d’optimisation, on cherche à réduire les coûts, mais on reste souvent dans un cadre de pensée conventionnel. On applique une solution standard, puis on tente de la rendre moins chère. Cette approche, bien que sécurisante, atteint rapidement ses limites et nous prive de percées significatives.

Mais si la véritable clé de la performance n’était pas de rogner sur l’existant, mais de réinventer la question de départ ? Si, au lieu de subir les contraintes, nous les utilisions comme un levier pour une créativité radicale ? C’est tout l’esprit de la « variante » : une proposition alternative qui ne se contente pas d’être différente, mais qui vise à être fondamentalement meilleure. Il ne s’agit pas d’une simple substitution de matériau, mais d’une remise en question de la conception même du projet pour atteindre un niveau supérieur de performance, de durabilité ou d’efficacité.

Cet article n’est pas un catalogue de solutions, mais un manifeste pour l’ingénieur-inventeur qui sommeille en chaque chef de projet et entrepreneur. Nous allons explorer comment transformer chaque défi en opportunité, depuis l’analyse de la valeur pour débusquer les dépenses inutiles jusqu’aux méthodes pour briser la force de l’habitude. L’objectif est de vous armer d’une nouvelle perspective pour non seulement résoudre les problèmes, mais pour concevoir les projets exceptionnels de demain.

Pour naviguer à travers cette exploration de l’ingéniosité en construction, ce guide est structuré pour vous mener de la théorie à la pratique, en vous donnant des outils concrets à chaque étape.

Ce projet est-il le plus performant possible pour le budget alloué ? L’analyse de la valeur pour traquer les coûts inutiles

L’optimisation des coûts est une préoccupation centrale, surtout dans un contexte où le portefeuille d’infrastructures publiques géré par la Société québécoise des infrastructures (SQI) a explosé, comme le souligne le rapport du Vérificateur général du Québec, qui montre un portefeuille de projets atteignant 27,5 milliards de dollars en 2021. Cependant, l’approche la plus courante, la réduction des coûts, est souvent contre-productive. Elle consiste à prendre un design existant et à y substituer des composants moins chers, dégradant souvent la qualité ou la durabilité. L’analyse de la valeur propose une révolution copernicienne : elle ne se demande pas « comment faire moins cher ? », mais « comment accomplir la même fonction pour moins cher ? ».

La nuance est fondamentale. Il ne s’agit plus de réduire la qualité d’un mur, mais de se demander si le mur lui-même est la meilleure façon de remplir sa fonction (structurale, séparative, isolante). Cette méthode pousse à identifier les coûts qui n’apportent aucune valeur perçue par l’utilisateur final et à les éliminer. C’est un exercice d’ingéniosité contextuelle qui force à décomposer un projet en fonctions essentielles (abriter, supporter, éclairer) et à évaluer la pertinence de chaque dépense par rapport à ces fonctions.

Un exemple frappant au Canada est l’analyse du coût sur le cycle de vie. Un investissement initial plus élevé dans une enveloppe de bâtiment ultra-performante peut sembler coûteux. Pourtant, au Québec, avec des hivers pouvant atteindre les -25°C, les économies de chauffage sur 30 ou 50 ans peuvent rendre cet investissement extrêmement rentable. Le Conseil du bâtiment durable du Canada (CBDCA) a d’ailleurs mis au point des outils pour quantifier cette viabilité financière, démontrant qu’une performance holistique sur le long terme est souvent plus économique qu’une vision court-termiste.

En remettant en question la nécessité de chaque composant, l’analyse de la valeur ouvre la porte à des variantes audacieuses, bien au-delà de simples ajustements cosmétiques.

Quand le béton préfabriqué ou le bois d’ingénierie remplacent l’acier et le béton coulé sur place : des exemples de variantes gagnantes

L’une des variantes les plus spectaculaires en construction moderne concerne le choix des matériaux structuraux. Remplacer l’acier et le béton coulé traditionnels par des alternatives comme le béton préfabriqué ou le bois d’ingénierie n’est pas un simple changement technique ; c’est une décision stratégique qui peut transformer radicalement un chantier, surtout dans le contexte climatique québécois. Ces matériaux permettent de déplacer une grande partie du travail du site, exposé aux intempéries, vers un environnement d’usine contrôlé.

Le béton préfabriqué, par exemple, est un atout majeur pour les chantiers hivernaux. La fabrication en usine garantit une qualité constante, indépendante de la température extérieure, et une résistance optimale aux cycles de gel-dégel. Les recherches du Conseil national de recherches du Canada (CNRC) ont montré l’importance d’atteindre un certain niveau de maturité du béton avant l’exposition au gel, une condition facilement maîtrisable en usine pour garantir une durabilité maximale, un béton de qualité devant rester sous un seuil de 91% de saturation critique.

Installation d'éléments préfabriqués en béton sur un chantier québécois en conditions hivernales

Comme le montre cette image, l’installation d’éléments préfabriqués se poursuit même en plein hiver, accélérant considérablement le calendrier du projet. La mise hors d’eau du bâtiment est plus rapide, permettant aux autres corps de métier d’intervenir plus tôt à l’abri. De plus, les planchers précontraints de grande portée réduisent le nombre de colonnes intérieures, offrant une flexibilité d’aménagement future inégalée. Voici quelques stratégies concrètes d’utilisation du béton préfabriqué comme variante gagnante :

  • Réduire le travail sur site pendant les hivers rigoureux en préfabricant en usine contrôlée.
  • Accélérer la mise hors d’eau du bâtiment avec des éléments prêts à installer.
  • Optimiser les structures avec des planchers précontraints de grandes portées qui réduisent le nombre de colonnes.
  • Utiliser des panneaux architecturaux minces, combinant béton et acier léger, pour des façades performantes et esthétiques.
  • Planifier la déconstruction et la réutilisation des éléments préfabriqués en fin de cycle de vie du bâtiment.

Cette approche transforme une contrainte climatique en avantage compétitif, une philosophie qui peut s’appliquer à bien d’autres aspects d’un projet.

Comment générer 20 idées en 30 minutes pour résoudre un problème technique : la méthode du brainstorming « SCAMPER »

L’innovation ne naît pas toujours d’un éclair de génie. Elle est souvent le fruit d’un processus structuré de « déverrouillage créatif ». Face à un problème technique, notre cerveau a tendance à suivre des chemins de pensée familiers. Pour le forcer à explorer de nouvelles avenues, la méthode SCAMPER est un outil formidable. C’est un acronyme qui représente sept verbes d’action pour questionner un problème ou un produit existant et générer des idées de variantes.

SCAMPER signifie : Substituer, Combiner, Adapter, Modifier, Proposer un autre usage, Éliminer, Renverser. Appliquons cela à un problème concret en construction : la gestion du gel sur les accès d’un bâtiment commercial au Québec. – Substituer : Peut-on substituer les granulats traditionnels dans le béton des trottoirs par des matériaux qui accumulent la chaleur ? L’utilisation de bétons modernes avec des adjuvants spécifiques est déjà une réalité, offrant une résistance exceptionnelle au gel-dégel. – Combiner : Peut-on combiner un système de chauffage radiant avec des matériaux de revêtement perméables pour évacuer l’eau de fonte ? – Adapter : Peut-on adapter les technologies de dégivrage de l’aéronautique pour les entrées piétonnes ? – Modifier : Peut-on modifier la pente ou la texture de la surface pour empêcher l’eau de stagner ? – Proposer un autre usage : La chaleur rejetée par le système de ventilation du bâtiment peut-elle être récupérée pour chauffer les entrées ? – Éliminer : Peut-on éliminer complètement le besoin d’une entrée à niveau en concevant un accès couvert et protégé ? – Renverser : Au lieu de chauffer par le dessous, peut-on installer une structure qui empêche la neige de tomber sur la zone ?

Cette gymnastique mentale force à sortir des solutions évidentes comme l’épandage de sel. Le choix de la bonne approche dépendra ensuite d’une analyse comparative, un peu comme on le fait pour les produits déglaçants courants.

Comparaison des approches de protection contre le gel
Approche Efficacité Coût Impact environnemental
Sel de magnésium Modérée par temps doux Économique Faible
Chlorure de calcium Excellente par grand froid Élevé Modéré
Mélanges avec abrasifs Bonne Moyen Réduit
Protection prolongée contre le regel Optimale Variable Dépend du produit

En trente minutes, une équipe peut ainsi passer d’une unique solution évidente à une vingtaine de pistes innovantes, prêtes à être analysées plus en détail.

Vous avez une meilleure idée que celle des plans ? La méthode pour proposer et faire valider une « variante »

Avoir une idée brillante est une chose ; la faire accepter en est une autre. Dans le monde très structuré de la construction, proposer une « variante » aux plans et devis originaux est un processus formel qui exige rigueur et persuasion. Une variante n’est pas une simple suggestion, c’est une proposition technique et économique complète qui doit démontrer sa supériorité par rapport à la solution de base. Pour qu’elle soit prise au sérieux par le client, l’ingénieur et l’architecte, elle doit être solidement documentée.

Oubliez l’idée lancée à la va-vite sur un coin de table. Une proposition de variante est un mini-projet en soi. Elle doit prouver qu’elle est non seulement réalisable, mais qu’elle apporte un bénéfice tangible : réduction des coûts, gain de temps, amélioration de la performance, augmentation de la durabilité ou simplification de la maintenance. La clé du succès réside dans la qualité de la préparation et de la présentation. Il faut anticiper les questions, lever les doutes et rendre les avantages de votre idée évidents pour toutes les parties prenantes.

Le processus peut sembler intimidant, mais il peut être décomposé en étapes logiques. La modélisation BIM (Building Information Modeling) est devenue un allié incontournable, car elle permet de visualiser la variante en 3D, de détecter les conflits potentiels et de communiquer l’idée de manière beaucoup plus intuitive que des plans 2D. Une analyse comparative des coûts, qui inclut non seulement la construction mais aussi l’exploitation future, est également essentielle pour prouver la rentabilité de votre proposition.

Votre plan d’action pour proposer une variante gagnante

  1. Documentation technique : Rassemblez tous les éléments probants. Préparez une modélisation BIM pour une visualisation 3D claire, ainsi que tous les dessins techniques détaillés (topographie, architecture, structure) nécessaires pour démontrer la faisabilité.
  2. Analyse comparative : Évaluez rigoureusement les impacts. Montez un dossier comparatif chiffrant les coûts et les bénéfices de votre variante par rapport à la solution initiale, en considérant l’ensemble du cycle de vie du projet.
  3. Validation de la conformité : Assurez la légitimité de votre proposition. Vérifiez et documentez la conformité de votre idée avec toutes les normes en vigueur, notamment le Code de construction du Québec, pour rassurer les décideurs.
  4. Argumentaire de présentation : Préparez une communication percutante. Rédigez un rapport d’ingénierie complet et préparez une présentation qui met en évidence les avantages de manière simple et visuelle pour le client et les autres professionnels.
  5. Anticipation et validation : Solidifiez votre dossier. Si la variante est particulièrement innovante ou complexe, envisagez de faire appel à un tiers indépendant pour une validation externe, ce qui renforcera considérablement la crédibilité de votre proposition.

C’est en maîtrisant ce processus que les ingénieurs et entrepreneurs les plus créatifs peuvent véritablement laisser leur marque sur un projet.

« On a toujours fait comme ça » : la phrase la plus dangereuse du BTP. Comment briser la force de l’habitude

C’est une phrase que tout innovateur a entendue. « On a toujours fait comme ça » est le chant des sirènes de l’inertie, le plus grand frein au progrès en ingénierie de construction. Cette résistance au changement n’est pas simplement une question de mauvaise volonté ; elle est ancrée dans une culture de gestion du risque où l’inconnu est perçu comme une menace. Pourtant, dans un contexte économique où l’immobilisme coûte de plus en plus cher, cette phrase devient un véritable danger pour la compétitivité des entreprises.

Vue macro détaillée de matériaux de construction innovants avec textures variées

L’urgence de briser cette habitude est criante. Les dernières données de Statistique Canada sur l’indice des prix de la construction de bâtiments révèlent des hausses de prix allant jusqu’à 13,4 % dans certaines villes canadiennes en une seule année. Continuer à « faire comme ça » signifie accepter passivement une érosion dramatique des marges et de la rentabilité. La véritable gestion du risque, aujourd’hui, n’est pas d’éviter l’innovation, mais de ne pas innover. La contrainte économique devient alors un puissant catalyseur pour le changement.

Briser la force de l’habitude exige une approche à la fois psychologique et stratégique. Il ne suffit pas de présenter une meilleure solution technique ; il faut déconstruire les peurs qui sous-tendent la résistance. 1. Quantifier le coût de l’inaction : Montrez, chiffres à l’appui, combien coûte le fait de s’en tenir aux vieilles méthodes. L’augmentation des coûts des matériaux, les délais prolongés dus aux aléas climatiques, les coûts de main-d’œuvre… ces chiffres sont des arguments imparables. 2. Dé-risquer l’innovation : Présentez la variante non pas comme un saut dans l’inconnu, mais comme une évolution maîtrisée. Utilisez des études de cas, des projets pilotes, des certifications de matériaux (comme celles du BNQ au Québec) pour prouver que la « nouveauté » est en fait déjà testée, validée et sécuritaire. 3. Créer des « victoires rapides » : Commencez par proposer des variantes sur des aspects moins critiques du projet. Le succès de ces petites innovations bâtira la confiance nécessaire pour s’attaquer à des changements plus fondamentaux.

L’objectif est de remplacer le « On a toujours fait comme ça » par un « Comment pourrait-on faire mieux ? ». C’est un changement de mentalité qui ouvre des possibilités infinies.

Transformer la contrainte réglementaire en opportunité d’affaires : l’exemple des bâtiments verts

Les normes et réglementations, comme celles encadrant les bâtiments verts, sont souvent perçues comme une contrainte coûteuse, une case à cocher pour obtenir un permis. C’est une vision limitée. Pour l’ingénieur-inventeur, chaque nouvelle réglementation est une mine d’or d’opportunités. Elle définit un nouveau standard de performance et crée un marché pour ceux qui savent l’atteindre de la manière la plus intelligente. Loin d’être un frein, la contrainte réglementaire est un moteur d’innovation et un avantage concurrentiel.

L’exemple des bâtiments à carbone zéro au Canada est particulièrement éloquent. La Norme du bâtiment à carbone zéro (BCZ) du CBDCA impose des cibles très strictes en matière d’émissions de carbone sur le cycle de vie. Au lieu de la voir comme un fardeau, les entreprises visionnaires l’ont adoptée comme un défi de conception. Le résultat ? Une explosion de l’innovation dans les systèmes CVAC, l’isolation, les matériaux biosourcés et la conception bioclimatique. Le CBDCA a d’ailleurs célébré une étape majeure, rapportant que le nombre de certifications BCZ-Design a plus que doublé en 2024, avec plus de 300 projets inscrits. Cela démontre qu’il existe une demande forte pour ces bâtiments ultra-performants.

Se positionner comme un expert de ces nouvelles normes permet non seulement de remporter des projets, mais aussi d’accéder à des financements spécifiques. Au Québec et au Canada, de nombreux programmes de subventions existent pour encourager la construction durable. Maîtriser ces réglementations devient une clé pour monter des dossiers de financement solides et rendre les projets plus rentables. Voici quelques exemples de programmes disponibles :

  • Le Fonds municipal vert de la Fédération canadienne des municipalités (FCM) qui soutient les projets de construction durable à grande échelle.
  • Les programmes d’Hydro-Québec qui offrent des incitatifs pour l’efficacité énergétique dans les bâtiments neufs ou rénovés.
  • Le programme Novoclimat du gouvernement du Québec, qui encourage la construction de nouvelles habitations à haute performance énergétique.
  • Les certifications reconnues comme LEED et BCZ qui, au-delà de leur valeur environnementale, deviennent des arguments de vente et de valorisation immobilière.

Cette approche proactive transforme l’ingénieur en partenaire stratégique, capable de générer non seulement un bâtiment conforme, mais aussi un actif performant et valorisé.

Points clés à retenir

  • L’analyse de la valeur ne vise pas à réduire les coûts, mais à optimiser la fonction pour un coût donné, ouvrant la voie à des solutions plus intelligentes.
  • Les contraintes spécifiques à un projet, comme le climat rigoureux du Québec ou une réglementation stricte, sont les meilleurs catalyseurs d’innovation et doivent être vues comme des opportunités.
  • Proposer une variante gagnante n’est pas un coup de tête, mais un processus structuré qui exige une documentation technique, une analyse économique et une communication persuasive.

Votre bâtiment est-il un dinosaure ? Le test pour évaluer sa capacité à évoluer

Un bâtiment conçu aujourd’hui sera encore là en 2070, voire plus tard. Dans un monde en mutation rapide, la plus grande faille d’un projet n’est pas son coût initial ou son esthétique, mais son incapacité à s’adapter. Un bâtiment rigide, incapable d’évoluer avec les nouvelles technologies, les nouveaux usages et les nouvelles normes climatiques, est un « dinosaure » en devenir : une structure magnifique mais condamnée à l’obsolescence. La capacité d’évolution doit donc devenir un critère de conception aussi important que la solidité ou le budget.

Penser en termes de variantes, c’est aussi penser à la « variante future ». Comment le bâtiment pourra-t-il intégrer des bornes de recharge pour véhicules électriques en masse ? Comment pourra-t-il passer à un système de chauffage entièrement décarboné ? Comment ses espaces pourront-ils être reconfigurés si les besoins des occupants changent ? Ces questions doivent être posées dès le départ. Des solutions comme les planchers libres, les cloisons modulaires ou les gaines techniques surdimensionnées sont des investissements mineurs aujourd’hui qui garantiront une flexibilité maximale demain. La Société québécoise des infrastructures l’a bien compris, en visant par exemple la certification LEED Argent pour plus de 20 de ses nouvelles Maisons des aînés en 2024, intégrant ainsi des principes de durabilité et d’adaptabilité dès la conception.

Pour évaluer si un projet est conçu pour durer ou s’il est un futur dinosaure, voici une grille d’évaluation simple inspirée des nouvelles normes de conception comme la BCZ-Design v4, qui intègrent déjà ces notions de résilience et d’adaptabilité.

Grille d’évaluation de la capacité d’évolution d’un bâtiment
Critère d’adaptabilité Indicateurs positifs Points d’amélioration
Résilience climatique Conception pour conditions météorologiques extrêmes Utilisation des données climatiques projetées
Électrification Infrastructure prête pour bornes de recharge Capacité électrique surdimensionnée
Flexibilité spatiale Planchers libres, cloisons modulaires Gaines techniques surdimensionnées
Décarbonation Plan de transition sans combustion fossile Systèmes CVAC compatibles avec l’électrification
Conformité future Respect du CNEB 2020 actuel Marge prévue pour les normes de 2030 et au-delà

Un bâtiment adaptable n’est pas seulement un atout environnemental ; c’est un actif financier dont la valeur se maintiendra bien mieux dans le temps.

La qualité ne se contrôle pas, elle se construit : comment intégrer l’assurance qualité à chaque étape de votre chantier

Dans l’approche traditionnelle, la qualité est souvent une affaire de contrôle final : on inspecte le travail une fois terminé pour y déceler les défauts. Cette méthode est non seulement coûteuse en reprises, mais elle est fondamentalement inefficace. La philosophie de l’ingénieur-inventeur est radicalement différente : la qualité ne se contrôle pas, elle se construit. C’est le principe de l’assurance qualité, qui vise à intégrer des processus et des standards à chaque étape pour prévenir les erreurs avant même qu’elles ne surviennent.

Cette approche commence bien avant le premier coup de pelle. Elle se matérialise dans le choix de matériaux dont la performance est certifiée, comme le Sikacrete-08 SCC, un béton autoplaçant homologué par le Ministère des Transports du Québec (MTQ) pour sa résistance supérieure au gel-dégel et l’absence de réaction alcali-granulat. En choisissant un tel produit, on « construit » la durabilité dans la structure même du projet. L’assurance qualité, c’est aussi le choix de ne pas gaspiller, comme le résume parfaitement Luc Bédard :

L’une des meilleures pratiques environnementales qui soient est le réemploi des structures déjà en place lorsqu’il est possible de le faire.

– Luc Bédard, Voir Vert

Intégrer la qualité, c’est aussi mettre en place une traçabilité rigoureuse tout au long du chantier. Les technologies numériques offrent aujourd’hui des outils puissants : applications mobiles pour documenter le travail en temps réel, capteurs IoT pour suivre la cure du béton, drones pour les inspections de sécurité… Ces outils ne servent pas à « surveiller », mais à créer une chaîne de confiance où chaque intervenant peut prouver la qualité de son travail et où les informations sont partagées de manière transparente. Cette « qualité construite » est la meilleure des variantes, car elle garantit la performance du projet sur le long terme.

Pour que cette culture de la qualité s’installe durablement, il est essentiel de définir des processus clairs dès le départ et de les partager avec toutes les équipes.

Pour mettre en pratique cette philosophie, commencez dès votre prochain défi technique par évaluer systématiquement au moins trois variantes avant de converger vers une solution. L’innovation la plus spectaculaire commence souvent par un simple changement de perspective.

Rédigé par Martin Tremblay, Martin Tremblay est un ingénieur civil senior avec plus de 25 ans d'expérience en géotechnique et en conception d'infrastructures majeures. Son expertise est reconnue pour l'analyse de sols complexes et la durabilité des ouvrages.